La tente de Dieu.

[Tatonga]

Dieu est le point zéro, l’origine et la cause.
Mais de quoi pouvait-il être l’origine et la cause ? Il ne le savait pas.
Il savait qu’il pouvait être l’origine et la cause de tout.
Mais de quoi ? Il ne le savait pas, car Dieu est théologique.
Pas praticien, mythologique et il ne savait pas.
Mais il avait un Premier ministre qui s’appelait Logos.

Je suis l’origine et la cause, mais de quoi puis-je l’être, lui demanda-t-il ?
Pour Logos, qui était mathématicien, logicien, naturaliste, biologiste et philosophe, c’était tout trouvé.
L’espace et le temps, Seigneur, Soyez l’origine et la cause de l’espace et du temps.
Soit, approuva Dieu, ainsi sera-t-il, mais comment distendre l’espace ?
Par des contraires qui s’opposeront et se repousseront, le blanc et le noir, le chaud et le froid,  le solide et le liquide, le gazeux…

Va pour l’espace, et pour le temps, comment faire s’écouler le temps, qu’y mettrais-tu ?
J’y mettrai les naissances et la mort, Seigneur, c’est-à-dire la vie ; et de la vie, je ferai d’autres contraires, le bon et le mauvais, le juste et l’injuste, le mal et le bien ; et ainsi, par les contraires et les contradictions, je confondrai l’espace et le temps en un tout uni dont vous serez l’origine et la cause, Seigneur.

Tout le secret est donc dans les contraires, les oppositions, les confrontations, j’avoue ne pas voir d’autre solution, je crois bien que c’est l’unique et qu’on n’a pas le choix,  tu es bien astucieux, reconnut le Seigneur, visiblement satisfait, mais la vie, la vie, comment ferais-tu la vie ?
Je fabriquerai le sexe, Seigneur.

Et c’est ainsi que Logos fabriqua la dimension du temps, la dimension de l’espace, et, dans le temps et dans l’espace, installa le sexe, les trois pieux de la tente de Dieu.
Les trois mâts de la tente de Dieu : l’espace, le temps, le sexe.

Le premier homme, puis celui qui vint plus tard et celui qui vint beaucoup plus tard, étaient inspirés, ils savaient  que Dieu ne pouvait être que théologique et ils le cherchèrent dans le mythologique. Derrière l’orage, derrière la lumière, dans la nuit, ils cherchèrent Dieu, les dieux, les demi-dieux et ne trouvèrent rien ; ils ne savaient pas que Dieu était caché derrière Logos, derrière le logos.

Il a fallu attendre longtemps et c’est beaucoup plus tard que l’homme comprit que l’œuvre était l’œuvre de Logos, que pour comprendre le monde il fallait être logos, et ils se fit logos, mais le logos s’arrêtait à Logos et ne pouvait mener à Dieu, retranché derrière Logos. Et parce que le logos s’arrêtait à Logos, certains croient aujourd’hui  que Logos est Dieu. Ils montent très haut jusqu’au Big-bang et Logos les arrête; ils descendent très bas dans la particule et Logos leur barre le chemin.

Ils peuvent tout savoir de Logos, mais rien de Dieu. Tout connaitre de l’impermanent, mais rien de l’être permanent. Point zéro, son essence est non quantifiable, inqualifiable, indénombrable, indémembrable.
Et Logos n’est pas Dieu ; sans Dieu, le point zéro, origine et cause, Logos ne pouvait rien construire.